Bonsoir
Désolé pour certains, mais vous avez tout faux !
Beaucoup d'artisans sont complètement cassés après 30 à 40 ans de travail physique, alors considérer leur activité comme de la PPG c'est ignorer à quel point de nombreux métiers et surtout de nombreux gestes techniques et postures sont usants.
Je suis bien placé pour en parler :
- j'ai suivi pendant plusieurs années des cours au CNAM en caressant l'idée de devenir ergonome car la santé des autres me tient à cœur. (Si je pratique le triathlon c'est avant tout parce que c'est une discipline « complète » et que l'on peut très bien concilier santé et performance, il est juste impératif de se poser des questions sur la préparation et d'être curieux pour trouver des réponses. J'avais cette même exigence les quelques temps que j'ai pu consacrer à entraîner)
- je suis moi-même artisan depuis un peu plus de 10 ans.
Aujourd'hui, ce qui me permet de progresser en natation ce n'est pas de passer des heures à enduire, poncer et peindre des plafonds et des murs – et parfois c'est plusieurs jours d'affilé, ce qui représente bien plus que la durée d'un ironman – ce n'est pas non plus de déplacer des sacs d'enduit de 25kg ou des bassines de plus de 20 kg de peinture, des sacs de gravats de 30 kg, etc., mais de faire du yoga et de la gym régulièrement toutes les semaines.
A mes débuts, maîtrisant très mal les outils, les matériaux et les techniques d'application j'ai eu des tendinites dans les épaules que je ne suis pas prêt d'oublier, j'avais l'impression que l'on m'enfonçait de grosses aiguilles des que mes bras passaient au-dessus de la ligne horizontale constituée par mes épaules. Lorsque j'allais à la piscine, les muscles de mes bras étaient tellement endoloris par la fatigue que je ne pouvaient pas prendre appui sur le bord du bassin pour me sortir de l'eau.
J'ai un confrère et ancien collègue d'industrie qui vient de prendre sa retraite, il a des douleurs dans les poignets, en septembre j'ai fait la connaissance d'un plaquiste qui a à peine 50 ans, il a des problèmes de sensibilité dans les mains et il y a quelques mois il s'est retrouvé avec le dos complètement bloqué, pourtant il est particulièrement bien bien charpenté et vraiment costaud.
Il y a 3 ans je me suis bloqué le dos en déplaçant un imposant radiateur. J'avais quelqu'un pour m'aider bien plus costaud que moi, mais la position du radiateur ne facilitait pas son déplacement et j'avais une très mauvaise prise. Heureusement, j'ai une très bonne professeure de yoga, elle maîtrise parfaitement la biomécanique, elle m'a fait faire des étirements en veillant au parfait placement de mon dos et du bassin, cela a beaucoup aidé à mon rétablissement.
Il existe des outils bien conçus pour les artisans mais ils coûtent souvent très cher et malgré leur conception, ils ne répondent pas toujours à toutes les situations, il faut donc souvent improviser. C'est sans compter sur l'ascenseur de l'immeuble qui tombe en panne alors que tu as des dizaines de sacs à gravats à descendre du 5ème étage... J'ai une très bonne petite ponceuse pour mes enduits, elle est légère, la prise en main est excellent dans de nombreuses situations mais par son fonctionnement est vibre obligatoirement et l'utiliser pendant 8 heures d'affilé me cause des fourmillements dans les doigts avec perte de sensibilité. Non ! Il n' y a pas de PPG dans le travail de l'artisan, il y a destruction plus qu'autre chose, il nous faut donc être très vigilant.
Je peux l'affirmer par expérience, pour vraiment être bien physiquement il faut pratiquer un sport dont on peut maîtriser la technicité, la gestuelle, les intensités, une technique qui ne met pas en péril tes articulations, tes tendons, etc. une gestuelle et des intensités qui ne vont pas au-delà de nos limites – il n'y a que les neuneus qui se persuadent qu'ils peuvent dépasser leurs limites, c'est du vent et aussi un discours formaté très à la mode. Des artisans, des ouvriers sont mal en point en fin de carrière car ils ont été au-delà de ce que leur corps permet parce qu'ils n'ont pas toujours le choix, ce n'est pas plus compliqué que cela, de même que les blessures chez les sportifs sont souvent liées à l'excès et /ou à de mauvaises postures, des intensités trop élevées, une récupération inadaptée et insuffisante, un mauvais choix de matériel, etc.
Il est clair pour moi que c'est surtout la pratique sportive qui me permet de tenir le coup avec mon travail. Le yoga m'est aussi d'une aide précieuse, ça me requinque, c'est fabuleux, presque magique !
Les artisans que je connais n'ont pas d'autres solutions que de foncer chez leur médecin qui va leur prescrire des anti-inflammatoires, produits auxquels je ne touche pas du tout, et les mettre en arrêt de travail (ce qui est généralement impensable pour un artisan).Mes plus de 30 années de pratiques sportive me permettent, globalement, de mieux aborder et gérer les pépins physiques que je peux rencontrer aujourd'hui pendant mon travail. Avec le sport j'ai acquis le « réflexe » ostéopathe, postures, étirements, récupération. La pratique sportive m'a permis de développer la notion de limite car le sport permet de se connaître. Je me sers, dans la mesure du possible, de mon expérience de sportif et de ce que j'ai appris au fil des ans pour anticiper les situations à risques et pour trouver des solutions qui m'éviteront des problèmes de santé. Et puis il y a un fait bien plus essentiel : je tiens à ma peau, tout simplement !Dans le cadre du travail, plongé dans l'action et dans la nécessité de gagner ta croûte, se prémunir et prévenir le danger passe généralement au second plan, certains artisans prennent de très gros risques, je pense principalement aux couvreurs.
La PPG ne s'improvise pas non plus, ce n'est pas une activité que l'on doit faire entre potes de club tout en se marrant, ça c'est lorsqu'on va se boire une bière après la séance, cela réclame de la concentration et de l'attention centrée sur soi pour être bien placé, car on peut très bien se blesser ou démolir les articulations si on ne se respecte pas.
Pour me requinquer je me fais faire aussi,de temps en temps, un massage ayurvédique qui est particulièrement apaisant et régénérateur.
Je reviens au sujet ! La pratique du triathlon est possible même lorsqu'on a un travail dit « physique », on a juste besoin d'un peu plus de repos et de réfléchir à son hygiène de vie : Pour le déjeuner, les plats préparés et les sandwichs préemballés (vraiment de la daube!) achetés en vitesse au supermarché situé à proximité de son chantier sont à proscrire. Il faut aussi oublier ces boissons soi-disant « énergisantes » et autres sodas (pour ne pas citer de nom..), j'ai pu me rendre compte que de nombreux jeunes artisans et ouvriers en bâtiment en sont grands consommateurs.
Sachant qu'aujourd'hui, bien plus qu'il y a 20 ou 30 ans, on a tous les éléments pour bien préparer un « Half » ou un triathlon « L » avec 8 heures d'entraînement par semaine tout en réalisant de bons chronos (sans pour autant dépenser une fortune en matériel :sans se faire embobiner par des discours marketing vantant les mérites du cardio qui te dit quand aller faire pipicaca, du vélo qui te permet un (soi-disant) gain de 2'' par km, d'une soi-disant IA – qui est loin d'en être une au sens strict du terme – qui va te promettre monts et merveilles pour ton entraînement à coup d'euros sonnants et trébuchants, etc.) sans avoir à s'entraîner 3 fois par semaine dans chaque discipline, mais en passant seulement 45 minutes à 1 heure dans l'eau, sur la piste d'athlétisme ou sur son home trainer pour faire ses séances à VMA, en faisant régulièrement de l'endurance dans les 3 disciplines, en étant progressif dans les intensités et dans la charge d'entraînement. Il n'est pas nécessaire de se faire des nœuds au cerveau pendant 6 à 8 mois pour être serein comme un nouveau né le jour « J », ni de se bouffer la santé à coup d'entraînements épuisants, (et cela d'autant plus pour un artisan). Sur cette base il sera ensuite possible de glisser vers l'Ironman et cela sans problème, il sera alors surtout important d'ajouter du kilométrage en foncier.
Je rentre chez moi le soir je suis effectivement fatigué par mon travail, je mange un peu, je me repose ½ à 1 heure et je vais m'entraîner. Je suis souvent surpris de ce que je suis capable de faire et de mes sensations et ce n'est pas parce que j'ai un travail physique, c'est parce que je m'entraîne régulièrement et que je sais me construire des séances efficaces qui ne m'épuisent pas, j'ai gardé une philosophie identique à celle qui était déjà mienne lorsque je travaillais en bureau d'études.
J'ai 56 ans et je suis fier d'être encore plutôt affûté, j'ai fait des choix qui m'ont permis d'être ainsi. Il faut parfois se faire violence pour aller s'entraîner, pour ne pas tomber dans la facilité : il est tellement plus simple de se planter devant son téléviseur tous les soirs Je n'ai pas non plus à traiter un diabète ou autre m...e du même genre qui apparaissent souvent au-delà de la cinquantaine. Mais je ne prétends pas être à l’abri d'une quelconque maladie grave, ce qui signifierait que je me sens au-dessus de la Nature, je fais en sorte de m'en préserver du mieux possible.
Être artisan c'est aussi faire sa compta tous les jours pour éviter d'être complètement dépassé par l'accumulation de paperasse, ce sont aussi de nombreux devis à rédiger et cela peut prendre plusieurs heures voire des journées entières. C'est aussi du travail qui arrive au coup par coup, des finances qui pleurent, des rendez vous tardifs chez les clients, des bourdes que l'on commet comme des problèmes que l'on rencontre qu'il n'était pas possible d'anticiper, des clients qui changent d'avis ou qui demandent une prestation supplémentaire en cours de chantier, etc. C'est une vie qui se gère au jour le jour et se projeter en est alors d'autant plus difficile, le quotidien nous apportant aussi, comme à tous, son lot de problèmes variés parfois lourds à gérer, tout cela mis bout à bout ne facilite pas la pratique du triathlon. Depuis 10 ans je ronge mon frein de ne pouvoir m'inscrire à la moindre course mais je sais que je serais parfaitement préparé le jour ou je poserais de nouveau mon vélo dans un parc, je ne me serais pas fait de nœuds au cerveau pour y arriver. Ce jour là je vais vraiment me régaler.
Bon entraînement.